D’abord réservé exclusivement à la gente masculine, le petit monde du jeu vidéo s’ouvre de plus en plus au sexe (dit) faible. L’une des figures de proue de la féminisation de l’univers vidéo-ludique n’est autre que Jane Jensen, game designer de la très réussie saga ésotérique en point & click : Gabriel Knight.
Il aura fallu de longues années pour que Gray Matter, la nouvelle création de Jane Jensen, voit le jour. Fans et critiques commençaient d’ailleurs à ne plus y croire, tant la sortie du jeu avait connu report sur report. Mais ça y est, après 7 années de dur labeur et d’innombrables contre-temps, le titre est enfin arrivé dans les bacs. L’attente valait-elle la peine ?
Une intrigue complexe...
Gray Matter est centré sur le personnage du Dr. David Styles, neurobiologiste, qui, depuis la mort de sa magicienne de femme, dans un terrible accident, vit en reclus dans sa maison de Dread Hill. Lorsque Samantha Everett vient frapper à sa porte, il l’engage quasi-immédiatement pour devenir son assistante. Dès lors, il lui confie différentes missions. La première : trouver six sujets de tests à l’Université d’Oxford pour l’une de ses expériences. Très vite, des incidents inexplicables surviennent et Styles se retrouve face au fantôme de sa femme...
Sam s’acquitte des missions confiées par le docteur à la manière d’un point & click classique. Elle discute et interroge les personnages croisés sur son chemin, tout en interagissant avec les éléments du décor pour résoudre des énigmes. Si la jeune fille soupçonne bien vite son employeur d’être victime d’une redoutable machination (d’un tour de magie !), ses journées ne se concentrent pas uniquement autour des services envers Styles. En effet, Sam, d’origine américaine, n’est pas arrivée à Londres par hasard. En parallèle de son travail pour le scientifique, elle enquête sur le Daedalus Club, un club des plus privés de Londres qu’elle souhaite intégrer et qui réunit la fine fleur de la magie.
Et un gameplay classique et efficace qui contrastent...
Au cours des 8 chapitres qui composent l’histoire, on en apprend davantage sur les personnalités et motivations réelles des héros, tous les deux jouables. Scindé en plusieurs quêtes pouvant être menées à bien en même temps, chaque chapitre se concentre sur une journée de la vie de Sam et du Dr. Styles. La progression dans l’histoire est quantifiée, tant dans les chapitres que sur les cartes des lieux à explorer. Pourcentages, points et autres zones grisées indiquent l’avancée dans le jeu et les quêtes restant encore à découvrir.
Comme on vous l’a dit un peu plus haut, Gray Matter a opté pour un gameplay classique et efficace de point & click.
Le joueur s’acquitte des différentes missions en interrogeant des personnages croisés sur son chemin ou un interagissant avec les éléments du décor. Dénichés et analysés, ils sont précieusement conservés dans l’inventaire disponible en haut de l’écran. Chaque item servira dans la résolution d’une énigme à venir, seul ou en combinaison avec un ou plusieurs autres objets.
A l’instar des derniers titres du genre, les phases d’exploration du jeu ont été facilitées pour être accessibles au plus grand nombre, quitte à décevoir les puristes. Les zones interactives du décor sont ainsi clairement indiquées au joueur. Un menu radial permet notamment de choisir l’endroit à scruter plus scrupuleusement.
L’avancée dans le jeu, que l’on peut suivre précisément grâce aux diverses indications évoquées précédemment, peut marquer un coup d’arrêt. La progression étant très linéaire, il arrive de se retrouver bloqué par une énigme que l’on n’arrive pas à résoudre. La majorité des puzzles n’ayant qu’une solution, si un détail vital échappe au joueur, le voilà coincé pour un moment à tourner en rond. Jusqu’à ce que l’évidence lui souhaite aux yeux !
Ce point & click classique se voit enrichi par le gameplay approfondi de l’intrigue secondaire. Sam, fouinant dans l’univers si particulier des magiciens, a recours, elle-même, à des tours de passe-passe pour progresser dans son enquête. Un grimoire permet de sélectionner l’action dont l’héroïne a besoin, que ce soit pour détourner l’attention de son interlocuteur et/ou dérober un objet.
... avec une réalisation plus permissive
Les décors sont riches et détaillés, l’ambiance torturée, le clair-obscur envoûtant, tout comme les thèmes musicaux absolument splendides. Si l’ambiance gothique est présente, elle est quelque peu gâchée par une animation trop rigide et statique. Les personnages principaux sont relativement bien modélisés mais il n’en va pas de même pour les figures secondaires. Les textes sont également bien trop petits et l’on doit se poster à 5cm face à l’écran pour pouvoir déchiffre le moindre caractère. La réalisation manque de vie, de finesse... de magie tout simplement.
Conclusion
Jane Jensen réussit son come-back avec le diablement envoûtant Gray Matter. Le scénario, aux petits oignons, mêle habilement science et fantastique, avec des personnages complexes, attachants, une ambiance sombre et torturée. Le titre se dote, en plus, d’une durée de vie dépassant allégrement la quinzaine d’heures.
Malgré une technique faiblarde, le jeu est un point & click efficace, avec un soupçon d’originalité dans son intrigue parallèle, qui devrait passionner plus d’un joueur.
Note : 15/20