La montagne escarpée, prise dans sa gangue de glace, revêt un caractère calme et paisible. Le lourd manteau blanc qui la recouvre la rendant presque accueillante, tendant ses bras duveteux à chaque visiteur venu s’y aventurer. Les vents qui s’engouffrent pourtant entre ses pics sont autant de plaintes assourdissantes, étouffant jusqu’au bruit des pas sur les surfaces gelées : les montagnes de Sibérie.
Région inhospitalière, proche du cercle polaire arctique, où les conditions météorologiques extrêmes sont le théâtre de tempêtes glaciales faisant chuter le mercure de manière vertigineuse. Un désert de roche et de glace, où la rudesse du climat et la faible concentration d’animaux sauvages peuplant ces contrées rendent les grands prédateurs bien plus agressifs, fondant sur la moindre proie pour stocker les réserves nécessaires à leur survie. Dans cet environnement hostile et sauvage l’Homme n’y a que peu de place, ou qu’épisodiquement lors d’expéditions ou de tentatives d’ascensions des sommets enneigés.
La jeune femme, les cheveux battus sur le visage, telles des griffes venant lacérer la fine couche de givre recouvrant sa peau, semble pourtant déterminée à percer les secrets que la chaîne montagneuse recèle en son sein. Guère plus âgée que lors du dernier rendez-vous qu’elle nous avait fixé, elle part cette fois plus motivée que jamais dans une quête quasi spirituelle, guidée par le souvenir de son père et la foi inébranlable de ce dernier en l’existence d’une cité légendaire gardienne d’un mystère qui dépasse de loin celui de la réalité de ses propres murs.
Ses traits et la profondeur de son regard parviennent tous deux à transmettre la moindre de ses émotions et pourraient presque estomper la magnifique toile de fond dans laquelle elle évolue d’un bout à l’autre de l’histoire. De tableaux grandioses, digne du vocabulaire du merveilleux, aux cavités les plus profondes, la faisant plonger au coeur de ténèbres oubliées, ses sentiments transparaissent à l’écran et ne font que la rendre encore plus attachante à nos yeux.
Ainsi, d’un réalisme certain, tant sur le plan des réactions de l’héroïne que celles des différents protagonistes, comme des environnements parcourus, le périple n’en demeure pas moins difficile. Plusieurs réglages s’offrent à vous, vous facilitant ou non l’expérience, mais quelque fût votre choix initial vous allez la voir mourir, et mourir encore, un nombre incalculable de fois au point que cette vision vous devienne insoutenable. A chaque cri de douleur, à chaque dernier souffle, vous jurerez qu’il en sera le dernier, la bande-son de qualité participe grandement à cette immersion, mais...vous la verrez périr à nouveau sous vos yeux redoublant votre vigilance et votre détermination de plus belle car à chaque faux pas, le sol peut se dérober sous ses pieds et lui occasionner une chute mortelle.
Devant cette adversité, frissonnante et transie de froid, elle pourra trouver néanmoins réconfort auprès de feux de camp disséminés sur son parcours. N’ayant pas pour objectif d’apaiser les souffrances de la demoiselle, bien que moralement cela nous fasse grand bien de la voir ainsi se reposer, ces points de contrôle lui donnent la possibilité de modifier, personnaliser son équipement et de parfaire ses compétences. Ces améliorations étant rendues accessibles par la collecte de richesses dûment gagnées au combat ou en examinant la carte à sa disposition où certains points dignes d’intérêts y sont localisés. Elle aura, de cette manière, la faculté d’adapter son matériel aux difficultés qui se dresseraient devant elle.
La zone géographique à parcourir est vaste et on ne se lasse pas de revenir sur des chemins déjà empruntés, se rendant compte que l’on est passé tout près d’un objet, d’un passage important ou tout bonnement pour rester contemplatif sous un angle du paysage que nous n’avions pas encore aperçu. L’observation minutieuse des alentours est d’ailleurs nécessaire afin qu’elle trouve son chemin parmi les innombrables pistes et sentiers, pour découvrir un quelconque secret bien dissimulé ou mener à bien tous les objectifs qui lui seront assignés.
A ce titre, des missions facultatives lui seront proposées. Certes, elle n’est pas tenue de les réaliser pour poursuivre sa quête principale, mais qu’il serait dommage, quel gâchis de ne pas profiter pleinement de l’intégralité de l’aventure et ne pas lui donner l’opportunité d’examiner quelques vestiges, quelques ruines et de se confronter à quelques énigmes supplémentaires tant le soin apporté à ceux-ci en vaut le détour. Si les stratagèmes à percer à jour ne sont, de manière générale, pas insurmontables, quoique pas toujours évidents non plus, ceux-ci sont très largement compensés par un scénario rondement mené et une mise en scène des lieux, des pièces qui satisferont la curiosité de l’historienne et de l’archéologue qui ne se cachent plus en elle.
La réussite de cette expédition polaire est rendue possible par de multiples points de sauvegarde automatique mais également, et surtout, comme tout bon jeu de ce type devrait en comporter, par des sauvegardes manuelles permettant de retrouver la jeune pilleuse de tombes à l’endroit même où nous l’aurions laissé quelques temps plut tôt. Ce système accentue encore le sentiment de liberté d’action dans la partie puisqu’il donne à la jeune femme la possibilité de reprendre sa route à l’endroit de son choix, lui offrant l’occasion de recommencer différemment un passage ou une épreuve, et non pas d’être renvoyée en aval d’un lieu qu’elle viendrait de traverser, mécontente de sa prestation mais ne pouvant revenir en arrière, ce qui pourrait lui déplaire. N’oubliez pas qu’elle est armée et relativement habile quant à se débarrasser d’éventuels indésirables et qu’à ce titre, même si nous nous sentons très proche d’elle, il est tout de même souhaitable de ne pas trop la contrarier.
Elle peut en outre envisager de voyager par le biais des feux de camp disposés sur la carte et ce dans l’optique d’explorer certains recoins sombres à côté desquels elle aurait pu passer trop rapidement, distraite souvent par un danger imminent, un glissement de terrain ou toute autre agression qui aurait pu détourner son regard, et quel regard, dans une toute autre direction. Elle pourra avoir alors la satisfaction de découvrir, de fait, un nouveau lieu où son adresse, ses aptitudes linguistiques autant qu’intellectuelles la conduiront à se surpasser pour en déjouer les pièges.
Vous l’aurez compris, ni de marbre ni de glace elle ne pourra vous laisser, seul le regret de voir l’histoire toucher à sa fin après l’avoir vu traverser tant d’adversités. La qualité de ce jeu ne tient pas seulement de la prestation graphique qu’il nous propose, très soignée, mais aussi de la familiarité éprouvée envers la courageuse aventurière, ainsi que de l’histoire si bien ficelée à laquelle elle est mêlée, qui vous promettent de longues heures à l’accompagner et vous tiendront en haleine jusqu’au bout.
Non, Lara n’est pas une fille d’un soir, mais malgré tout ce temps passé à ses côtés, il faudra bien vous y résoudre, il ne s’agissait là, pourtant, que d’une belle aventure...
19/20 : "la Belle...à faire"